dimanche 24 mars 2013

Tapisserie de Bayeux, 1066-1082, lin, 68,30 mètres de long et de 50 centimètres de large, musée de Bayeux.

L'image et le récit



Cette longue tapisserie (70 mètres de long!) fut brodée par des moines ou des dames de compagnie de la reine. Elle semble avoir été commandée par Odon de Bayeux, le demi-frère de Guillaume le Conquérant . 
 

Elle détaille les événements clés de cette conquête, notamment la bataille de Hastings. Toutefois, près de la moitié des images relatent des faits antérieurs à l'invasion elle-même. Elle a une grande valeur documentaire sur la vie de l'époque au XIe siècle. Elle renseigne sur les vêtements, les châteaux, les navires et les conditions de vie de cette époque. À ce titre elle constitue un des rares exemples de l'art roman profane.

Six cent vingt-six personnages, deux cent deux chevaux et mules, cinq cent cinq animaux de toutes sortes, trente-sept édifices, quarante-neuf arbres sont recensés. Au total, mille cinq cent quinze sujets variés fournissent une mine de renseignements sur le XIe siècle.
Elle est constituée de neuf panneaux en lin, d'une longueur d'environ 68,30 mètres et large d'environ 50 centimètres. Il faut aussi remarquer que la broderie est amputée. Sa fin est perdue mais elle devait se terminer, d'après tous les historiens, par le couronnement de Guillaume.

Les tentures narratives, qui comme la Tapisserie de Bayeux étaient occasionnellement visibles de tous les fidèles, n’étaient pas seulement destinées à décorer les églises. Elles narraient une histoire aux nombreux analphabètes de l’époque.

La Tapisserie a elle aussi sa morale : l’homme qui trahit un serment sacré a commis un péché, et pour ce péché il n’est qu’une issue possible : la mort !
L’histoire est racontée peut-être avec moins de réalisme, car l’artiste concentre son attention sur ce qu’il juge important, c’est-à-dire l’histoire, et la forte expression des personnages et des actions.

 

La victoire de Samothrace, Antiquité grecque, 190 av J-C, Musée du Louvre, Paris

Arts, ruptures et continuités, l’œuvre d'art et la tradition du socle et du piédestal.




 


























La Victoire de Samothrace, réalisée vers 190 avant J-C., à l’époque hellénistique, sur l'île de Samothrace*, en haut du sanctuaire des Grands Dieux se dressait une statue de la déesse de la Victoire posée sur une curieuse base de pierre figurant l'avant d'un navire. La statue est à présent, exposée en haut des grandes marches au musée du Louvre.


L'île de Samothrace




Il s’agit d’une représentation en ronde-bosse de la déesse de la Victoire, une femme ailée, dressée à la proue d'un navire.




La Victoire de Samothrace figure parmi les œuvres les plus admirée du Louvre : elle incarne " l'esprit grec " dans un rendu saisissant de la figure humaine. Essentiellement inspirés par la figure humaine, les artistes grecs vont créer un art à la mesure de l'homme et centré sur lui, contrastant avec les autres civilisations antiques qui l'ont précédé.A l’époque antique, elle était située sur l'île de Samothrace, en haut du sanctuaire des Grands Dieux, posée sur une curieuse base de pierre figurant l'avant d'un navire. Elle était visible de la mer. La statue est à présent, exposée en haut des grandes marches au musée du Louvre. 

Vous pouvez découvrir cette œuvre analysée sur le site du Louvre: http://musee.louvre.fr/oal/victoiredesamothrace/indexFR.html

 

lundi 18 mars 2013

Explosion ! Les héritiers de Jackson Pollock


La performance prend peu à peu une large part en tant que mode opératoire dans la Peinture abstraite de la 2nde partie du XXeme siècle.
Jackson Pollock, Untitled, 1949, Fondation Beyeler à Bâle

Alors qu'une exposition explicitant cet aspect de la production artistique en peinture s'est déroulé dernièrement à la Tate Modern de Londres, Novembre 2012 sous l'intitulé A Bigger Splash: Painting After Performance , une exposition reprenant des questionnements proches, Explosion !, se déroule à Stockholm puis à la Fundació Joan Miró à Barcelone.

Saburo Murakami, Tsuka (le passage), 2ème exposition Gutaï, Ohara Kaikan hall, Tokyo, 1956





Niki de St Phalle, Shooting Picture, 1961
Kazuo Shiraga peint avec ses pieds, suspendu par des cordes au-dessus de sa toile, Shozo Shimamoto lance violemment des bouteilles de verre emplies de peinture sur ses tableaux, et Niki de Saint Phalle tire à l'arme à feu sur le châssis qu'elle a prémuni de ballons de baudruche gonflés de peinture. Explosion! Présente environ 70 travaux de 35 artistes allant de la période de la fin des années 1940 aux années 1970.

vidéo sur Anthropométries de Y. Klein.
Yves Klein, Anthropométry, Princess Helena, 1960, NY, MoMA
Après la 2nde Guerre Mondiale, de nombreux artistes souhaitent attaquer la peinture en « l' explosant » pour créer une rupture avec les conventions artistiques. Explosion ! constate la fin du Modernisme ; quand celui-ci était si mûr qu'il explosa ; ce qu'il fit en une variété de cheminements pour produire de l'art. Chaque nouvelle porte franchie à coup de pied, à coup d'effet, le fut de façon agressive.

Une nouvelle génération d'artistes commençaient à s'envisager non comme peintres ou sculpteurs mais simplement comme des artistes qui regardaient tous les potentiels matériels et thématiques de l'art. C'est ainsi que l'artiste et écrivain nord américain Allan Kaprow, l'homme qui a inventé le mot 'happening', décrit la situation en 1956 dans son essai « L'héritage de Jackson Pollock ». Alors que les portes s'ouvrent à d'autres techniques, les nouvelles formes de l'art, happenings, performances et l'art conceptuel (où l'idée prime sur le reste) conduisent à de nouvelles approches de la peinture. Il s'agit d'une évolution de la peinture en tant qu'objet d'art et en tant que représentation, vers la mise en avant du processus qui génère le travail artistique et ses aspects performatifs.
Dans Explosion! Les œuvres démontrent la fascination des artistes pour le hasard comme méthode de création, pour la performance et les approches conceptuelles.
Muttsu no ana, 6 Trous, 1955-2006  
Le groupe d'artistes Japonais Gutai (1954-1972), ont opéré de façon radicale à la frontière entre la peinture et la performance, anticipant par la-même de nombreuses pratiques et stratégies telles celles de l'art conceptuel, du Land Art et de l'installation. En Europe, ils exposèrent avec des artistes du Groupe Zero également présenté dans Explosion ! (Gunter Uecker et Otto Piene).
( vue de l'installation de
Explosion!Peinture comme action, 2012)
Cette exposition présente des peintures, photographies, vidéos, performances, des travaux dansés et sonores. Explosion! shows works by thirty-five artists and comprises paintings, photos, videos, performance, dance and audio works and instructions. Yves Klein et le groupe Gutaï introduisent la peinture dans leur performance comme actes peints. Ils provoquent des controverses importantes, de même pour Lynda Benglis, Hermann Nitsch, Andy Warhol et Janine Antoni.




dimanche 10 février 2013

Eugène Delacroix, Sardanapale : des études à l'oeuvre

Arts, espace et temps : La genèse d'une œuvre d'art

 Delacroix, Étude pour la Grèce à Missolonghi et la liberté guidant le peuple, encre brune, mine de plomb,Musée Delacroix,

 « Ébaucher et finir en même temps, contenter l'imagination et la réflexion du même jet »
Delacroix.




Eugène Delacroix (1798-1863), La Mort de Sardanapale (1827), 392 x 496 cm, huile sur toile, musée du Louvre, Paris



« Les révoltés l'assiégèrent dans son palais [...]. Couché sur un lit superbe, au sommet d'un immense bûcher, Sardanapale donne l'ordre à ses eunuques et aux officiers du palais d'égorger ses femmes, ses pages, jusqu'à ses chevaux et ses chiens favoris ; aucun des objets qui avaient servi à ses plaisirs ne devait lui survivre. » 
Eugène Delacroix, livret du Salon (2e supplément), 1827




Le romantisme 
 

Les peintres romantiques laissent libre cours à leur imagination et expriment leur sensibilité à travers le rêve, l’évasion ou l’exotisme.

Leurs œuvres, tout en mouvement et aux couleurs plutôt chaudes, sont parfois pleines de tourment, de violence, de sensualité, de passion et de sentiments.





Du récit à l’œuvre 
 

Inspiré par le Sardanapale (Sardanapalus, 1821) du poète anglais Lord Byron, l'un des écrivains phare du romantisme. Le poème raconte la fin tragique de ce roi légendaire d’Assyrie, qui, voyant le pouvoir lui échapper à la suite d’une conspiration, choisit, lorsqu'il se rendit compte que sa défaite était inéluctable, de se jeter en compagnie de sa favorite, Myrrha, une esclave ionienne, dans les flammes d’un gigantesque bûcher. Or, Delacroix représente Sardanapale sacrifiant tous ses sujets.



C'est que Delacroix emprunte le thème du sacrifice des femmes, des chevaux et du trésor à un autre auteur, antique cette fois, Diodore de Sicile, qui, dans sa Bibliothèque historique, raconte une scène analogue : « Pour ne pas se retrouver prisonnier de l’ennemi, il fit installer dans son palais un gigantesque bûcher sur lequel il plaça son or, son argent et tous ses habits de monarque ; s’enfermant avec ses femmes et ses eunuques dans un espace aménagé au milieu du bûcher, il se laissa ainsi brûler avec ses gens et son palais. »









Des œuvres à l’œuvre



A demi-allongé, la tête dans la main, barbu et enturbanné, Sardanapale rappelle les sultans moghols ou qadjars, les statues antiques, les figures de Michel-Ange, le Michel-Ange dans son atelier de Delacroix, le Jérémie pleurant sur la destruction de Jérusalem de Rembrandt, l'Héraclite de L’ Ecole d’Athènes de Raphaël. 



 



Des esquisses à l’œuvre



Les nombreuses feuilles d'études préparatoires, esquisses, ébauches, où il analyse un à un, pendant six mois, les mouvements variés des corps, leurs postures, les accessoires, les groupes, la tension de la scène, sa dynamique et l’intensité des expressions, témoignent du désir de Delacroix de désir de saisir la composition d’ensemble avec vérité tout en conservant sa spontanéité.






 

  


 

Des fantasmes sur l'Orient à la recherche de réalité 
 

L’Orient est, à cette époque, un objet de fascination, auquel l’époque prête tout ce qu’elle n’assume pas chez elle : barbarie, passion, sensualité débridée. L’histoire de Sardanapale fonctionne comme un réservoir de possibles pour Delacroix qui n'a pourtant jamais voyagé en orient.

Il partira quatre ans plus tard, en 1832, voyager en Afrique du Nord, au Maroc puis en Algérie. Il y réalisera de nombreux carnets de croquis annotés qui lui servirons à son retour pour réaliser des tableaux.

Au fil du voyage, il emplit ses carnets de croquis et d'aquarelles. Un répertoire inépuisable des formes et des couleurs qui embraseront plus tard toutes ses toiles inspirées par la passion de l'Orient.





vendredi 18 janvier 2013

Joseph Beuys, un artiste socialement engagé


Joseph Beuys, né à Krefeld, en 1921 et décédé, en 1986 à Düsseldorf, est un artiste allemand qui a produit en nombre des dessins, sculptures, performances, vidéos, ou encore installations. Très engagé politiquement, sontravail questionne les thèmes de l'humain, de l'écologie, de la société et de l'environnement. Il invente le concept de « sculpture sociale » . Il pense que tout homme est artiste, et que si chacun utilise sa créativité, tous seront libres. Il imagine une Œuvre d'art totale à l'échelle de toute une société réinventée.


Un événement va être déterminant pour la suite de sa vie : pilote de la Luftwaffe sur le front russe pendant la Seconde Guerre mondiale, il s’écrase en Crimée. Il raconte alors que, recueilli par des nomades tatares qui l’ont nourri de miel, il est revenu à la vie, recouvert de graisse et enroulé dans des couvertures de feutre. Ces éléments qui lui auraient sauvé la vie deviennent des matériaux primordiaux dans sa production artistique.


Ainsi, il  inclut dans ses installations des matériaux organiques qui lui tiennent à cœur depuis son accident d’avion : le feutre qui isole du froid, la graisse symbole de chaleur et d’énergie, le miel, mais aussi la cire d’abeille, la terre, le beurre, les animaux morts, le sang, les os, le soufre, le bois, la poussière, les rognures d’ongle, les poils. Ces derniers matériaux montrent la réutilisation par Beuys des déchets, non pas pour les magnifier, mais pour les mettre au service de l’art et explorer leur matérialité.






Une mythologie personnelle :
L'artiste s'invente s'invente un
personnage. Une sorte d'artiste
chamane, un guérisseur de la société et de ses maux. (Joseph Beuys suivait
des études de médecine avant leur
interruption par la guerre.)







 Définition : Une performance : une action menée par l'artiste face à un public. Elle a un scénario, des accessoires et interroge le corps-même.

L'oeuvre : I like America and America likes Me, 1974
Contexte : ouverture de la galerie René Block à New York en mai 1974.
durant la guerre du Vietnam.
Durée : pendant trois jours


Le déroulement (scénario) de la performance :
Joseph Beuys débute cette action alors qu’une exposition est annoncée à New York, en mai 1974, dans la galerie René Block. Une ambulance se présente à son domicile à Düsseldorf, en Allemagne. Il est alors pris en charge sur une civière, emmitouflé dans une couverture de feutre.


Alors s'accomplit un voyage en avion à destination des États-Unis, toujours isolé dans son étoffe. À son arrivée à l’aéroport Kennedy de New York, une autre ambulance l’attend. 

 

 

 

Surmontée d'un gyrophare et
escortée par les autorités américaines, elle le transporte jusqu’au lieu d’exposition. De cette façon, Beuys ne foulera jamais le sol américain à part celui de la galerie : il avait en effet refusé de poser le pied aux Etats-Unis tant que durerait la guerre du Viet-Nam. 

 

 

Il coexiste ensuite
pendant trois jours avec un coyote sauvage, récemment capturé dans le
désert du Texas, qui attend derrière un grillage. 

Avec lui, Beuys joue de
sa canne, de son triangle et de sa lampe torche. 

 

Il porte son habituel
chapeau de feutre et se recouvre d’étoffes, elles aussi en feutre, que le
coyote s’amuse à déchirer.

 

 

Filmés et observés par les visiteurs derrière un grillage, l’homme et l’animal partagent ensemble le feutre, la paille et le territoire de la galerie avant que l’artiste ne reparte comme il était venu.
 


 

Interprétation
L'artiste évoque le fossé existant entre la nature et les villes modernes ; les Amérindiens décimés dont il commémore le massacre lors de la conquête du pays.
Pour certains, Beuys engage ici une action chamanique (de sorcier), en représentant l’esprit de l’homme blanc et le coyote celui de l’Indien. Il essaie de réconcilier l’esprit des Blancs et l’esprit des Indiens d’Amérique.




Joseph Beuys - Sonne statt Reagan 1982 

 

Une prédelle de Paolo Ucello


Paolo Ucello, Le miracle de l'hostie, 1469
Dimensions :  Hauteur 32 cm Largeur 343 cm
Nature de l’image : peinture sur bois
Technique utilisée : Détrempe sur panneau
Lieu de conservation : Urbino, Galerie Nationale delle Marche

L'Histoire d’une hostie profanée : cette légende est véhiculée dès le XIIe siècle. Elle a des consonances antisémites que l'artiste ne partage pas vraiment, puisqu'il en fait une interprétation très personnelle où tous les personnages finissent "châtier".
Pour comprendre cette légende : l'hostie est un morceau de pain qui représente de façon symbolique le corps de Jésus Christ dans la religion chrétienne. Ainsi, nous voyons un morceau de pain saigner. Toujours dans cette religion, lors de la messe, le prêtre transforme ce pain en "corps du Christ". C'est ce que l'on appelle la "consécration" : une sorte de rituel magique en quelque sorte. Ces rites inspirent les artistes de la Renaissance. Ce sont les thèmes que recherchent leurs commanditaires.

Scène 1 : Afin de pouvoir rembourser une dette contractée avec un juif usurier, une femme chrétienne se décide à voler une hostie et la lui remet comme ils l’avaient au préalable convenu.


 Scène 2 : Dans les mains du juif,qui la poignarde, l’hostie commence à saigner. Avertis de cette profanation, des hommes en armes viennent arrêter l’usurier et sa famille.

  Scène 3 : Une procession conduite par le pape ramène l’hostie vers un autel, afin de la re-consacrer.





 Scène 4 : La "pécheresse" s’apprête à être pendue, mais elle est sauvée in extremis par un ange dans l'histoire initiale. Paolo Ucello choisit de la pendre malgré tout (Nous retrouvons son corps dans la scène 6).

Scène 5 : L’usurier juif et les siens sont brûlés vifs en place publique. Paolo Ucello tire son histoire d'une légende parisienne du XIIe siècle, mais il choisit de faire pendre la femme, dont le corps (Scène 6) sera disputé par les anges et les démons.



"Fou de perspective", Paolo Ucello, comme dans la plupart de ses œuvres fait la démonstration de sa maîtrise de cette technique tout récemment mise au point.

 Il passe d'une scène à l'autre en reprenant certains éléments du décor, tel le damier du carrelage (s1 et s2), le paysage dont l'horizon se retrouve d'une image à l'autre. Le passage a une nouvelle scène est encore signifié par l'ajout d'éléments architecturaux (colonnes) entre les images.