dimanche 10 février 2013

Eugène Delacroix, Sardanapale : des études à l'oeuvre

Arts, espace et temps : La genèse d'une œuvre d'art

 Delacroix, Étude pour la Grèce à Missolonghi et la liberté guidant le peuple, encre brune, mine de plomb,Musée Delacroix,

 « Ébaucher et finir en même temps, contenter l'imagination et la réflexion du même jet »
Delacroix.




Eugène Delacroix (1798-1863), La Mort de Sardanapale (1827), 392 x 496 cm, huile sur toile, musée du Louvre, Paris



« Les révoltés l'assiégèrent dans son palais [...]. Couché sur un lit superbe, au sommet d'un immense bûcher, Sardanapale donne l'ordre à ses eunuques et aux officiers du palais d'égorger ses femmes, ses pages, jusqu'à ses chevaux et ses chiens favoris ; aucun des objets qui avaient servi à ses plaisirs ne devait lui survivre. » 
Eugène Delacroix, livret du Salon (2e supplément), 1827




Le romantisme 
 

Les peintres romantiques laissent libre cours à leur imagination et expriment leur sensibilité à travers le rêve, l’évasion ou l’exotisme.

Leurs œuvres, tout en mouvement et aux couleurs plutôt chaudes, sont parfois pleines de tourment, de violence, de sensualité, de passion et de sentiments.





Du récit à l’œuvre 
 

Inspiré par le Sardanapale (Sardanapalus, 1821) du poète anglais Lord Byron, l'un des écrivains phare du romantisme. Le poème raconte la fin tragique de ce roi légendaire d’Assyrie, qui, voyant le pouvoir lui échapper à la suite d’une conspiration, choisit, lorsqu'il se rendit compte que sa défaite était inéluctable, de se jeter en compagnie de sa favorite, Myrrha, une esclave ionienne, dans les flammes d’un gigantesque bûcher. Or, Delacroix représente Sardanapale sacrifiant tous ses sujets.



C'est que Delacroix emprunte le thème du sacrifice des femmes, des chevaux et du trésor à un autre auteur, antique cette fois, Diodore de Sicile, qui, dans sa Bibliothèque historique, raconte une scène analogue : « Pour ne pas se retrouver prisonnier de l’ennemi, il fit installer dans son palais un gigantesque bûcher sur lequel il plaça son or, son argent et tous ses habits de monarque ; s’enfermant avec ses femmes et ses eunuques dans un espace aménagé au milieu du bûcher, il se laissa ainsi brûler avec ses gens et son palais. »









Des œuvres à l’œuvre



A demi-allongé, la tête dans la main, barbu et enturbanné, Sardanapale rappelle les sultans moghols ou qadjars, les statues antiques, les figures de Michel-Ange, le Michel-Ange dans son atelier de Delacroix, le Jérémie pleurant sur la destruction de Jérusalem de Rembrandt, l'Héraclite de L’ Ecole d’Athènes de Raphaël. 



 



Des esquisses à l’œuvre



Les nombreuses feuilles d'études préparatoires, esquisses, ébauches, où il analyse un à un, pendant six mois, les mouvements variés des corps, leurs postures, les accessoires, les groupes, la tension de la scène, sa dynamique et l’intensité des expressions, témoignent du désir de Delacroix de désir de saisir la composition d’ensemble avec vérité tout en conservant sa spontanéité.






 

  


 

Des fantasmes sur l'Orient à la recherche de réalité 
 

L’Orient est, à cette époque, un objet de fascination, auquel l’époque prête tout ce qu’elle n’assume pas chez elle : barbarie, passion, sensualité débridée. L’histoire de Sardanapale fonctionne comme un réservoir de possibles pour Delacroix qui n'a pourtant jamais voyagé en orient.

Il partira quatre ans plus tard, en 1832, voyager en Afrique du Nord, au Maroc puis en Algérie. Il y réalisera de nombreux carnets de croquis annotés qui lui servirons à son retour pour réaliser des tableaux.

Au fil du voyage, il emplit ses carnets de croquis et d'aquarelles. Un répertoire inépuisable des formes et des couleurs qui embraseront plus tard toutes ses toiles inspirées par la passion de l'Orient.