Arts,
espace et temps : La
genèse d'une œuvre d'art
Delacroix,
Étude pour la Grèce à Missolonghi et la liberté guidant
le peuple, encre brune, mine de plomb,Musée Delacroix,
« Ébaucher
et finir en même temps, contenter l'imagination et la réflexion du
même jet »
Delacroix.
Eugène
Delacroix (1798-1863), La Mort de Sardanapale
(1827), 392 x 496 cm, huile sur toile, musée du Louvre, Paris
«
Les révoltés l'assiégèrent dans son palais [...].
Couché sur un lit superbe, au sommet d'un immense bûcher,
Sardanapale donne l'ordre à ses eunuques et aux officiers du palais
d'égorger ses femmes, ses pages, jusqu'à ses chevaux et ses chiens
favoris ; aucun des objets qui avaient servi à ses plaisirs ne
devait lui survivre. »
Eugène
Delacroix, livret du Salon
(2e supplément), 1827
Le
romantisme
Les
peintres romantiques laissent libre cours à leur imagination et
expriment leur sensibilité à travers le rêve, l’évasion ou
l’exotisme.
Leurs
œuvres, tout en mouvement et aux couleurs plutôt chaudes, sont
parfois pleines de tourment, de violence, de sensualité, de passion
et de sentiments.
Du
récit à l’œuvre
Inspiré
par le Sardanapale (Sardanapalus,
1821) du poète anglais
Lord Byron, l'un des écrivains phare du romantisme. Le
poème raconte la fin tragique de ce roi légendaire d’Assyrie,
qui, voyant le pouvoir lui échapper à la suite d’une
conspiration, choisit, lorsqu'il se rendit compte que sa défaite
était inéluctable, de se jeter en compagnie de sa favorite, Myrrha,
une esclave ionienne, dans les flammes d’un gigantesque bûcher.
Or, Delacroix représente Sardanapale sacrifiant tous ses sujets.
C'est
que Delacroix emprunte le thème du sacrifice des femmes, des chevaux
et du trésor à un autre auteur, antique cette fois, Diodore
de Sicile, qui, dans sa Bibliothèque
historique, raconte une scène
analogue : « Pour ne pas se retrouver prisonnier de l’ennemi,
il fit installer dans son palais un gigantesque bûcher sur lequel il
plaça son or, son argent et tous ses habits de monarque ;
s’enfermant avec ses femmes et ses eunuques dans un espace aménagé
au milieu du bûcher, il se laissa ainsi brûler avec ses gens et son
palais. »
Des
œuvres à l’œuvre
A
demi-allongé, la tête dans la main, barbu et enturbanné,
Sardanapale rappelle les sultans moghols ou qadjars,
les statues antiques, les figures de Michel-Ange, le
Michel-Ange dans son atelier
de Delacroix, le Jérémie
pleurant sur la destruction de Jérusalem
de Rembrandt, l'Héraclite de
L’ Ecole d’Athènes de Raphaël.
Des
esquisses à l’œuvre
Les
nombreuses feuilles d'études préparatoires, esquisses,
ébauches, où il analyse un à un, pendant six mois, les
mouvements variés des corps, leurs postures, les accessoires, les
groupes, la tension de la scène, sa dynamique et l’intensité des
expressions, témoignent du désir de Delacroix de désir de saisir
la composition d’ensemble avec vérité tout en conservant sa
spontanéité.
Des
fantasmes sur l'Orient à la recherche de réalité
L’Orient
est, à cette époque, un objet de fascination, auquel l’époque
prête tout ce qu’elle n’assume pas chez elle : barbarie,
passion, sensualité débridée. L’histoire de Sardanapale
fonctionne comme un réservoir de possibles pour Delacroix qui n'a
pourtant jamais voyagé en orient.
Il
partira quatre ans plus tard, en 1832, voyager en Afrique du Nord, au
Maroc puis en Algérie. Il y réalisera de nombreux carnets
de croquis annotés qui lui servirons à son retour pour réaliser
des tableaux.
Au
fil du voyage, il emplit ses carnets de croquis et
d'aquarelles. Un répertoire inépuisable des formes et des couleurs
qui embraseront plus tard toutes ses toiles inspirées par la passion
de l'Orient.
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